Fils de Temüdjin

Fils  de Temüdjin

Les enfants des rues 1

Les enfants perdus de Gengis-Khan

 

www.ipak.org/net/.../text/Mongolia%20lost%20children.doc

 

Selon l’UNICEF, en 2000, près de 3000 enfants vivaient dans les rues d’Ulaanbaatar,
capitale de la Mongolie. En 2001, la situation ne s’est pas améliorée. Ces enfants des rues ont entre 5 et 18 ans et s’organisent en bandes du même âge pour échapper à la violence des plus grands. Violence qui les a poussés aussi à fuir familles ou foyers d’accueil. Et aussi la misère.  Mais à la différence des enfants du Caire, de Bogota ou de Rio, ils ne sont pas tous abandonnés.

Très petits pour leur âge, résultat de carences alimentaires, ils errent, par bandes de 5 ou 6, en quête d’argent ou de nourriture qu’ils trouvent bien souvent dans les poubelles. Affaiblis, ils sont une proie facile pour la maladie, notamment la tuberculose.

 

Chaque bande possède son chef et son territoire. Vêtus de haillons, ils déchargent des
marchandises, lavent des voitures, ramassent des canettes ou des bouteilles usagées pour des sommes dérisoires. L’été ils dorment dans les cages d’escalier, les squares, sur les toits d’immeubles, ou à même le trottoir. L’hiver ils se réfugient sous terre, dans les entrailles de la
ville, lovés contre les canalisations d’eau chaude.

Ils luttent au jour le jour pour survivre. Pour eux, le futur se limite à demain.
Un paquet de gâteaux les nourrit pour plusieurs jours. Ils ont choisi la rue pour échapper à la violence de leurs aînés. Ils préfèrent cette liberté précaire à l’autorité des adultes, aux règles strictes des foyers, aux queues des soupes populaires. Ils refusent en bloc le monde des plus grands qui les a trop fait souffrir.

 

 

9h30 du matin à Ulaanbaatar.  Le soleil fait de son mieux pour réchauffer les trois enfants qui dorment sur le trottoir à même le sol, recroquevillés, les bras le long du corps à l’intérieur du tee-shirt, les mains dans le pantalon. Même les nuits d’été sont froides à 1300m d’altitude. Les bruits de
la rue s’installent de nouveau pour la journée. Les premiers passants partent travailler, ils contournent les enfants. Pas le temps. D’ailleurs, à cette heure, le trio ne devrait plus se trouver là, quelqu’un risque d’appeler la police. Il faut qu’ils se réveillent, qu’ils partent. Mais Bayarbileg rêve, il
sourit dans son sommeil, il est chez lui dans la « ger » (yourte en mongol). Sa mère rallume le poêle et prépare le thé au lait du petit-déjeuner. L’odeur chaude lui dit qu’il est l’heure de se lever. La chaleur emplie de nouveau la ger. Bayarbileg ouvre les yeux.

 

Ebloui, il les referme. Il n’est pas chez lui, ce n’est pas le pôele qui chauffe la ger mais le soleil qui le
caresse. A quoi bon se réveiller, il rêvait.Cette vie-là c’était avant, quand il s’occupait du troupeau, quand il vivait heureux avec ses parents. Avant que son père ne meure. Avant que sa mère ne se remarie. L’autre homme était là pour hurler, ordonner et taper. Il les obligeait à le servir, lui et sa mère. Maintenant, il ne s’occupe plus du troupeau. Il passe ses journées dehors avec d’autres enfants de son âge. Il n’obéit plus à personne, il donne les ordres. Bayarbileg est chef. Chef d’une bande de cinq enfants des rues. Les seuls ordres qu’il écoute sont ceux de son estomac. Bayarbileg
rouvre les yeux. Munk et Gansukh  dorment encore à côté de lui. La nuit a été courte, hier soir la police les a embarqués, ils ont passé un bon moment au commissariat. Tous les trois ont réussi à se sauver pendant la nuit. Mais deux autres de leur bande n’ont pas eu la même chance. Ils vont sûrement retourner dans leur famille ou bien aller dans un foyer où ils seront battus par les plus grands.  Ils vont devoir être plus vigilants parce qu’ils ne sont plus que trois pour se défendre. Bayarbileg doit veiller sur les deux autres, il est leur chef, il est le plus âgé, il a 13 ans les autres en
ont 11.

Bayarbileg les secoue énergiquement : ”Debout vous deux, j’ai faim ! Il faut que nous soyons les premiers devant le grand magasin. A trois on ne peut plus s’imposer par la force, alors il faut
qu’on y soit avant les premiers ! ”

Ils passeront leur journée à quémander de l’argent ou de la nourriture. Ils préfèrent cette liberté à l’autorité des adultes, aux règles strictes des foyers, aux queues des soupes populaires.
Alors ils font comme si la vie de la rue était la meilleure des vies. L’été ils dorment dehors, ”là où il y a du soleil”… L’hiver ils dorment sous terre, comme beaucoup d’autres, contre les canalisations d’eau chaude de la ville. Ils sont 3000 enfants à vivre ainsi dans la rue.

 

Crise économique et conditions climatiques catastrophiques 

 

Ces enfants de la rue sont le fruit de la crise économique que traverse la Mongolie depuis une dizaine d’années. Après avoir entretenu pendant plus de 70 ans des liens étroits avec l’ancienne Union Soviétique, le passage du régime communiste au régime parlementaire, adopté en 1992

par la Mongolie, ne s’est pas fait sans difficultés.

Le changement de système économique a entraîné la fermeture de dizaines d’entreprises d’état.

Les employés se sont retrouvés au chômage ce qui a provoqué un exode rural massif vers la capitale. A cette crise se sont ajoutées les conditions climatiques catastrophiques de ces deux dernières années.

Le « dzud », sécheresse l’été et hiver glacial, a décimé plus de 2,9 millions de têtes de bétail.

Ce chiffre a été aggravé, l’hiver dernier, par une épizootie de fièvre aphteuse. Un grand nombre d’éleveurs, désormais sans troupeau, a grossi les rangs des chômeurs d’Ulaanbaatar.

Les problèmes d’alcoolisme liés au chômage entraînent l’augmentation des violences
physiques et des abus sexuels au sein des familles. Ce qui pousse les enfants à rejoindre l’univers de la rue. Pourchassés par la police, ils sont rassemblés dans les commissariats, puis, ensuite, dirigés soit vers les orphelinats, soit les foyers et les hôpitaux créés par les ONG ou encore vers
la prison, selon leur âge et leur état de santé.

 

Ils sont une centaine entre 13 et 18 ans dans la prison pour mineurs de la
capitale. Les ONG s’attachent à comprendre l’origine des problèmes pour les
résoudre et enrayer le phénomène. Elles tentent, notamment, d’empêcher les
jeunes filles de se tourner vers la prostitution.

 

 

Commissariat de police, département recherche d’identité pour enfants.

 

A droite, une grande cuisine où s’activent des femmes. A l’entrée du long couloir, un policier lit le journal. Deux fillettes courent. Ce sont des jumelles ; habillées à l’identique, elles courent après un ballon. Elles entrent dans une salle où d’autres enfants regardent la télévision ; indifférentes, elles lancent leur balle.

Une cinquantaine d’enfants attendent, là, qu’on statue sur leur sort. Ramassés dans la rue par la police, enfants en fuite ou abandonnés, on recherche leur identité. Plus tard, ils seront envoyés dans des foyers, orphelinats ou familles d’accueil. Les jumelles ne seront sûrement pas placées dans la même  famille. Encore insouciantes, elles traversent le couloir et ouvrent la porte d’une cellule. Une de celles qui, habituellement, sert d’étape aux enfants en route vers la prison pour mineurs. On est dans un commissariat. Dans celle-ci dort un enfant. Il est malade, on doit le conduire à l’hôpital.

Le bruit des autres ne le réveille pas. L’air grave, les deux sœurs quittent la cellule ; elles laissent la porte ouverte. Les jumelles, comme les autres enfants des rues, sont minuscules pour leur âge. Elles ont six ans mais en paraissent trois. Des années de malnutrition laisseront d’indélébiles
séquelles, traces de leur pauvre vie.

Au fond du couloir, deux pièces dans lesquelles on installe des matelas pour la nuit…

 

Le colonel de police, les yeux cernés par le malheur de ces enfants, cherche des  solutions.

Marre de retrouver toujours les mêmes enfants dans la rue. Marre de les ramener dans leurs familles où ils sont battus, malmenés, mal-aimés. Marre de ce flux incessant d’enfants.

 

Etonnant paradoxe : ce haut gradé, puissant par son statut, réalise sa totale  impuissance face à l’ampleur de la tâche et sollicite l’aide des ONG. 

. . . . . 

Avec leur sens de la formule, les observateurs occidentaux ont baptisé les enfants
des rues d’Ulaanbaatar  les « enfants-taupes ». Parce que l’hiver venu– il dure ici plus de 6
mois de l’année-  ils désertent les trottoirs pour se réfugier dans le sous-sol de la ville. Ils y accèdent par les regards d’égouts dont les couloirs sont maintenus à température constante par
les canalisations d’eau chaude qui alimentent la capitale. Le long de ces conduits, ils trouvent une chaleur qui leur permet de survivre aux hivers les plus rigoureux qui, comme l’an dernier, ont atteint des températures inférieures à –40°.

Combien de ces enfants, descendants des fiers guerriers de Gengis-Khan, résisteront aux grands froids de l’hiver prochain ?

L’aide internationale  leur est plus que précieuse, elle est vitale.

 

 

 

 

World Vision,

ONG néozélandaise, création de plusieurs foyers à
Ulaanbaatar, réinsertion des enfants à la sortie de prison, aide directe aux
enfants de la rue, coopération avec les services de la police mongole :
suivie des enfants dans leur famille, placements en foyers et adoption.

 

Lotus Children’s Centre Mongolia

ONG australienne, petite 
structure qui accueille aussi les plus petits, école maternelle et soup
Kitchen.

 

 

Save The Children,

ONG anglaise, création en Mongolie de plusieurs foyers pour
les enfants des rues et cours du soir pour les enfants qui travaillent la
journée.



13/10/2011
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